Présenté il y a déjà près d'un an, le projet de loi visant à ratifier le traité sur le tunnel ferroviaire Lyon-Turin entre dans sa phase finale. Le texte a été entériné le 23 octobre par les commissions des affaires étrangères et du développement durable de l'Assemblée nationale, avant une adoption définitive prévue en séance plénière le 31 octobre.
Outre la création d'un promoteur public détenu par l'Etat français et italien, l'accord répartit la charge financière qui incombe aux deux pays : la France financera la section transfrontalière du nouveau tunnel à hauteur de 42,1% contre 57,9% pour l'Italie.
Le Lyon-Turin, "c'est comme l'adhésion de la Turquie"
Si le vote a été acquis sans difficulté, les débats publics en commission du développement durable ont révélé des dissensions profondes du côté des écologistes et des doutes plus ou moins marqués dans les rangs des centristes de l'UDI : les députés Yannick Favennec et Stéphane Demailly se sont montrés réservés sur ce projet atteignant 26 milliards d'euros, dont 8,5 milliards pour le tunnel. Leur collègue Bertrand Pancher n'a d'ailleurs pas hésité à voter contre le texte. Le Lyon-Turin, c'est "comme l'adhésion de la Turquie" à l'UE, a-t-il comparé. "On retarde en disant que ça n'arrivera jamais". Dans un communiqué, il plaide contre ce "projet pharaonique" qu'il faudrait selon lui délaisser au profit d'une modernisation de la ligne existante.
Les écologistes tiennent le même raisonnement : des députés comme Noël Mamère, Danielle Auroi ou encore Michèle Bonneton refusent cette nouvelle liaison transalpine, arguant de la faiblesse des besoins. "La ligne n'est utilisée qu'au cinquième de sa capacité", a rappelé Michèle Bonneton. Entre 1998 et 2011, le trafic annuel de marchandises par le rail est ainsi passé de 34 à 23 millions de tonnes sur la ligne du Mont Cenis.
Bouclage financier
La faute revient aux travaux, qui ont perturbé la circulation, mais pas seulement. Perchée à 1.300 mètres d'altitude, cette ligne "n'est pas attractive", estime la députée-maire de Chambéry (PS), Bernadette Laclais. Accès difficile, durée de la traversée, capacités limitées pour des raisons de sécurité…
Les entreprises préfèrent donc effectuer le franchissement en utilisant le transport routier, plus polluant. Et améliorer de nouveau la ligne existante ne semble guère faisable pour le président de la société Lyon-Turin Ferroviaire, Hubert du Mesnil : "Si l'on veut faire une autoroute ferroviaire, il faudrait refaire tous les ponts pour les mettre à la dimension des camions pouvant passer sur les trains", objecte-t-il.
Fervente partisane du projet, la Commission européenne est prête à couvrir 40% du coût du tunnel de base, soit 3,4 milliards d'euros. Le bouclage financier n'étant pas acquis, des outils d'ingénierie financière plus sophistiqués pourraient être envisagés, comme les project bonds. A condition de pouvoir dégager un minimum de rentabilité. Celle-ci sera "faible", estime Christian Deschemeeker, de la Cour des comptes, présent à un débat à l'Assemblée nationale le 22 octobre.
Même si le projet avance, et que le percement de 9 km de l'un des deux tubes du tunnel a été annoncé, les hostilités restent fortes. L'écologiste Noël Mamère prophétise un fiasco qui "ressemble assez furieusement à Notre-Dame-des-Landes". De l'autre côté des Alpes, les opposants passent aux actes. Ces dernières semaines, des bétonnières et une grue ont été incendiées sur le chantier du Lyon-Turin.
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